8 nov. 2012

L’ONU élit le régime génocidaire soudanais à l'une des plus hautes instances des droits de l’homme

UN Watch exhorte les États-Unis, l’Union européenne et le Secrétaire général de l’ONU à dénoncer ce choix.
NEW YORK, 8 novembre - UN Watch, l’organisme non gouvernemental de droits de la personne sis à Genève, a exhorté le Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, la Commissaire aux droits de l’homme Navi Pillay, à l'ambassadeur américaine Susan Rice et à Catherine Ashton de l’Union européenne à condamner l’élection, aujourd’hui à l’ONU, du Soudan « génocidaire, misogyne et tyrannique » au Conseil économique et social (ECOSOC) formé de 54 États-membres ». L’ECOSOC est une haute instance onusienne responsable de la régulation des groupes de défense des droits de l’homme, de la supervision des comités de l'ONU dédiés aux droits des femmes et de la formulation de résolutions allant de la liberté sur Internet jusqu’à la mutilation génitale féminine.
« C'est un scandale », a déclaré Hillel Neuer, directeur général de UN Watch. « Le même jour où nous apprenons que le Soudan est en train de tuer des bébés et d’incendier des maisons au Darfour - précisément le genre de situation désastreuse dont l’ECOSOC devrait se préoccuper urgemment -, l'ONU rend la protection cruciale des droits de l’hommes moins probable que jamais ».
« Il est inexplicable que 176 des 193 États membres de l'ONU aient voté en faveur du régime sanguinaire d'Omar el-Béchir et manquent de reconnaître que l'élection du Soudan génocidaire à un organisme mondial des droits de l'homme revient à choisir Jack l'Eventreur pour protéger un refuge pour femmes», a dit Neuer.
«En accordant le sceau de la légitimité internationale à un meurtrier de masse, le système des droits humains des Nations Unies a aujourd'hui perdu de sa crédibilité et jeté une ombre sur la réputation de l'organisation dans son ensemble. »
Bien que les Etats-Unis aient pris des mesures importantes en septembre dernier pour presser le Soudan de se retirer des élections de ce lundi au Conseil des droits de l'homme composé de 47 pays – avec le soutien d’une campagne massive menée par la vedette de cinéma Mia Farrow et UN Watch - l'administration Obama a été étonnamment silencieuse sur le vote d'aujourd'hui.
En revanche, en 2004, l'ambassadeur américain avait notoirement quitté l'ECOSOC, après que le Soudan y fut élu.
Selon des initiés, le silence de Washington sur le Soudan pourrait découler de la crainte de mécontenter les Etats africains et arabes en anticipation de la fragile candidature des Etats-Unis pour un siège au Conseil des droits de l’homme lors du vote du 12 novembre.

Le directeur général de UN Watch Hillel Neuer (centre) en route pour le siège de l’Onu pour y tenir une conférence de presse en compagnie de l’ancien prisonnier politique vénézuélien Eligio Cedeno (à gauche) du président de Human Rights Foundation Thor Halvorssen (à droite) à l’occasion de la publication d’un nouveau rapport de la présentation de pétitions de parlementaires et d’ONG opposés aux candidatures du Pakistan, du Venezuela, du Kazakhstan et d’autres abuseurs de droits au Conseil des droits de l’homme. Des victimes viendront aussi de ces pays pour témoigner. Le vote aura lieu lundi le 12 novembre. Hélas, on s’attend à ce que la candidature des Etats-Unis, bien qu’ils soient le chef de file à l’ONU en matière d’actions positives sur la question des droits de l’homme, soit défaite.


Des cinq candidats occidentaux en lice pour les trois sièges alloués, les Etats-Unis auraient obtenu le moins d’engagements de soutien, se situant derrière l'Allemagne, la Suède, l'Irlande et la Grèce, qui ont sollicité des appuis à l’échelle mondiale bien avant que Washington ne jette son chapeau dans l’arène.
L'administration Obama a promis que lorsqu’un pays fait l’objet d’un embargo du Conseil de sécurité pour des violations massives des droits de l’homme, « des rôles de leadership comme la présidence des organes de l'ONU devraient lui être purement et simplement interdits. Ceux qui abusent du droit ou des normes internationaux ne devraient pas former le visage public de l'ONU ».
Pourtant, même si le président soudanais el-Béchir a été inculpé par la Cour pénale internationale pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité - en vertu d'un renvoi du Conseil de sécurité - la voix des Etats-Unis est restée muette, tout comme celle de l'Union européenne.
Le régime d'el-Béchir va désormais contribuer à la sélection des membres de la Commission de la condition de la femme, du conseil d’administration d'ONU-Femmes et de celui de l'UNICEF qui protège les droits des enfants.
En vertu de la Charte des Nations Unies, l'ECOSOC est le principal organe légiférant sur des questions liées à la promotion du «respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous».
Fait important, l'ECOSOC est également l'organisme qui accrédite et supervise la défense des droits humains à l'ONU et qui décide de qui peut participer au Conseil des droits de l'homme.
L'influence dominante de tyrannies au sein des 19 membres du notoire "Comité sur les ONG» de l’ECOSOC a souvent conduit au rejet ou à l'expulsion de groupes de défense des droits humains qui osent critiquer la Chine, Cuba ou d'autres États répressifs membres de l'ONU, ou d’organismes qui parlent au nom de groupes minoritaires ethniques ou en faveur des droits des homosexuels.



Le président de l’Assemblée générale de l’ONU a publié sur Twitter l’annonce de la victoire du Soudan génocidaire et d’autres pays, puis ses félicitations.

 « Il n’y a pas de doute que le Soudan aura une mauvaise influence », a déclaré Neuer. « C'est une décision terrible. Pourquoi les dirigeants du monde ont-ils perdu leur voix morale? Ceux qui ont échoué à prévenir (cette décision) doivent au moins prendre la parole pour les victimes du Darfour, ainsi que pour la décence et la moralité élémentaires. »
UN Watch a également protesté contre l'élection d'autres pays qui, sans être génocidaires, présentent un dossier faible, voire terrible en matière de droits humains, dont le Turkménistan, la Bolivie, Haïti, la Tunisie, le Koweït, le Kirghizistan et le Népal.
Les tyrannies sont désormais habilitées. Par exemple, les médias d'Etat du Koweït n'ont pas tardé à immédiatement saluer la victoire comme une approbation mondiale de son régime répressif.
Lors des dernières sessions de l'ECOSOC on a débattu de résolutions sur le traitement des prisonniers, la liberté sur Internet, la discrimination, l'égalité des sexes et les mutilations génitales féminines.
Le Conseil économique et social décide quels pays siégeront, notamment, à la Commission des Nations Unies pour le développement social, la Commission de la condition de la femme, au Comité des droits économiques, sociaux et culturels, au conseil d'administration du Fonds des Nations unies pour l'enfance et du Conseil de l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes.



Traduit par David Ouellette (CERJI/CIJA)

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